Qu’est-ce que la neutralité alimentaire?

Quel est le problème?

Au cours de votre enfance, vous arrivait-il d’entendre des commentaires comme quoi certains aliments étaient « bons » ou « mauvais », et d’autres « sains » ou « malsains »? Bien qu’une telle approche en matière d’éducation nutritionnelle parte de bonnes intentions, elle peut néanmoins peser sur la relation qu’un enfant entretient avec la nourriture.

Le problème, lorsqu’on qualifie les aliments de « bons », « mauvais », « sains », « malsains », ou qu’on les répartit dans des catégories comme « malbouffe » ou « superaliments », c’est qu’on instaure une hiérarchie entre ces aliments. Cette dernière pourrait pousser les enfants à se sentir coupables, voire honteux d’avoir mangé (ou non) certains aliments¹.

Lorsque les adultes attribuent une étiquette positive ou négative aux aliments, il est possible que les enfants projettent ces sentiments sur eux-mêmes. Vous êtes-vous déjà dit : « Je me suis mal comporté, aujourd’hui : j’ai mangé des biscuits »? Ce que vous mangez (et ce que vous ne mangez pas) ne définit pas quel genre de personne vous êtes. Avoir mangé un biscuit ou une pomme ne fait pas de vous une bonne ou une mauvaise personne.

Alors, quelles stratégies utiliser?

Sur le plan alimentaire, une approche neutre est bénéfique

On ne connaît pas exactement les origines du terme « neutralité alimentaire ». Toutefois, on considère qu’il y a neutralité alimentaire quand :

• Tous les aliments ont la même valeur morale
• Aucun aliment n’a plus de valeur qu’un autre
• Aucun aliment n’est fondamentalement « bon », « mauvais », « sain » ou « malsain »
• Les aliments sont exempts de tout jugement

En adoptant une approche neutre, on se donne la permission de manger les aliments qui nous plaisent, sans ressentir de la culpabilité ou de la honte.

Les aliments n’ont pas tous la même valeur nutritionnelle, mais ils devraient être égaux d’un point de vue moral.

Nous n’affirmons pas que les biscuits possèdent les mêmes caractéristiques nutritionnelles que les pommes. Toutefois, en termes simples, chaque aliment contient des nutriments différents. La neutralité alimentaire consiste à éliminer tout jugement moral à l’égard des aliments, et donc tout jugement envers les autres ou soi-même qui soit basé sur des choix alimentaires.

Tous les aliments n’ont pas la même composition nutritionnelle, mais ils devraient être égaux d’un point de vue moral. 

À quoi ressemble une salle de classe ou une garderie neutre sur le plan alimentaire? 

La neutralité alimentaire vise à éviter de se focaliser sur les avantages ou les conséquences de tel ou tel aliment. Plus précisément, elle a pour but de créer un cadre dépourvu de tout jugement dans lequel les enfants peuvent se sentir à l’aise de manger toutes sortes d’aliments.

Quelles mesures immédiates pouvez-vous prendre pour instaurer une neutralité alimentaire?

• Présentez tous les aliments comme acceptables ou moralement équivalents. Évitez de les catégoriser comme « bons », « mauvais », « sains » et « malsains ».
• Appelez les aliments par leur nom. Par exemple, au lieu de désigner un aliment comme une « gâterie », appelez-le une « barre de chocolat ».
• Décrivez les aliments de façon objective, en mettant l’accent sur des caractéristiques telles que la couleur, la texture et la saveur.
• Remplacez les récompenses alimentaires par des récompenses sans rapport à la nourriture (p. ex. une récréation prolongée, de la musique ou une fête dansante).
• Ne félicitez pas les élèves lorsqu’ils essaient de nouveaux aliments. Une telle réaction reviendrait à exercer une certaine forme de pression, même si elle part d’une intention positive. Adoptez plutôt une attitude neutre en disant : « Je vois que tu as essayé un nouvel aliment. Qu’en as-tu pensé? », ou abstenez-vous de tout commentaire. C’est une habitude dont il est difficile de se défaire!
• Permettez aux enfants de manger tous les aliments qu’ils ont apportés, dans l’ordre qu’ils préfèrent.
• Donnez aux enfants des occasions d’apprendre les pratiques de manipulation sécuritaire des aliments, d’acquérir des compétences alimentaires et de découvrir toutes sortes d’aliments.
• Donnez l’exemple en adoptant une alimentation flexible.
• Suivez le principe du partage des responsabilités

Votre matériel pédagogique respecte-t-il les principes de la neutralité alimentaire?

Envisagez les mesures suivantes :

1. Examinez le cadre physique et vos ressources d’éducation nutritionnelle

Passez en revue les ressources que vous utilisez avec les élèves, vos plans de leçon et votre salle de classe. Les messages qui figurent dans vos ressources et votre classe font-ils preuve de neutralité alimentaire?

2. Réfléchissez à votre façon de parler

Comment parlez-vous des aliments avec les enfants? Pourriez-vous adopter une approche plus neutre? Certains facteurs vous empêchent-ils de le faire (p. ex. les directives du programme d’études)?

3. Examinez les activités que vous utilisez pour récompenser les enfants

Offrez-vous de la nourriture aux enfants qui ont accompli leurs tâches, qui ont terminé leurs activités ou qui se comportent bien? Pourriez-vous plutôt les récompenser en leur offrant certaines activités?

Que retenir?

Parler des aliments de manière neutre peut contribuer à améliorer la relation que les enfants entretiennent avec la nourriture et leur corps. Cette décision permettra également d’aider les enfants à apprendre à consommer une grande variété d’aliments – un processus de longue haleine.

Vous pouvez commencer à apporter de petits changements dans votre salle de classe ou votre garderie dès maintenant. Gardez toutefois en tête que changer la façon dont nous parlons des aliments peut prendre du temps. Par conséquent, donnez-vous du temps et faites preuve de patience tandis que vous modifiez votre façon de penser et de vous exprimer par rapport à la nourriture.

Conseils généraux sur l’alimentation : Les conseils alimentaires qui figurent dans ce blogue reposent sur les principes et les lignes directrices d’Ellyn Satter. Pour en savoir plus sur son travail, rendez-vous à ellynsatterinstitute.org.

Références :

1. Tribole, Evelyn. Intuitive Eating, 4th Edition. St Martin’s Press, 2020.